Lundi, 13.01.2025
Nouvelle Chance dans la restauration
Quelle idée se cache derrière l’association lebensträume@work?
Giovanna Conti: C’est l’association de soutien d’une entreprise sociale. L’objectif est de proposer un stage d’un an à des jeunes qui n’ont pas de solution au sortir de l’école, puis de trouver avec eux une place d’apprentissage. Soit ces jeunes rencontrent des difficultés socio-culturelles ou linguistiques, soit ils sont un peu perdus et nous voulons les aider à retrouver un avenir.
Qui peut en bénéficier?
G. C.: Nous collaborons avec le Zentrum für Brückenangebote (ZBA) à Bâle. Des jeunes âgés de 16 à 20 ans qui y suivent une formation sont orientés vers nous. Nous travaillons également avec la commune de Riehen. Grâce à un programme d’insertion professionnelle, de jeunes chômeurs de longue durée restent chez nous jusqu’à un an et demi, et nous les aidons à se défaire de dépendances telles que l’aide sociale. Hannes Fringeli: En plus de cela, nous avons deux places financées par des fondations privées, pour des jeunes sans solution de transition qui peuvent postuler librement.
Qu’apprennent vos protégés?
H. F.: D’abord des soft skills comme la ponctualité, la politesse et les bonnes manières. Tous ne s’orientent pas vers la restauration. L’un d’entre eux est devenu menuisier, un autre carrossier-peintre. Mais tous ont appris la structure. Ceux qui ont voulu rester dans la restauration ont trouvé un poste. G. C.: Nous proposons six places d’apprentissage que nous appelons stages parce que nous ne sommes pas une entreprise de formation. Nous testons ce qui convient le mieux à chacune: la cuisine, le service, l’offre de midi ou le traiteur. Au fur et à mesure, nos stagiaires assument plus de responsabilités, ce qui renforce leur confiance en eux. Ensuite, la dernière étape consiste à se mettre en situation de candidature à l’extérieur.
Comment cela se passe-t-il au Restaurant schlipf@work?
H. F.: Nous impliquons les stagiaires autant que possible à tous les postes. Le restaurant est ouvert de 9h à 23h et ils travaillent en équipe, en fonction de ce qui est autorisé pour leur âge. Nous ne les surchargeons pas, nous les laissons observer, participer, nous les formons lentement et les félicitons. Il est important de leur transmettre un sentiment de réussite parce que ça les motive. Certains n’ont jamais reçu le moindre compliment de toute leur vie. G. C.: Notre équipe est composée de 16 collaborateurs et collaboratrices professionnels dotés de fortes compétences sociales et qui ne cèdent pas facilement au stress. C’est indispensable quand quelque chose tourne mal. Les jeunes apprennent à communiquer avec les convives et ils ont un feedback. Les plats doivent correspondre, mais, pour le service, on pardonne les petites maladresses occasionnelles.
Les jeunes travaillent-ils aussi dans d’autres domaines?
H. F.: Tous participent à la production. Nous faisons une partie au restaurant et nous avons une cuisine de production non loin d’ici, où nous cuisinons et préparons les commandes. En revanche, pour le repas de midi, les jeunes donnent seulement un coup de main pour la livraison. Pour le service traiteur, certains clients demandent explicitement que nous envoyions des stagiaires.
«Nous tenons énormément à l’aspect familial»
Qui constitue votre clientèle?
G. C.: Il y a de tout: des habitués de Riehen et de Bâle, les trois corporations du Petit-Bâle, des directeurs de banque avec leurs équipes, des députés, la municipalité et beaucoup de personnes qui savent que nous sommes un établissement spécial et qui trouvent l’idée sympathique. Ça fonctionne énormément par l’extension du cercle d’amis ou de connaissances, car nous n’avons pas le droit de faire de la publicité. Cette année, nous avons dû refuser des commandes pour la première fois. H. F.: Le feedback est généralement positif. Nous avons beaucoup d’habitués qui sont ravis de suivre l’évolution des jeunes. Ils les soutiennent en discutant avec eux et en leur donnant des conseils.
Quel est le succès de votre concept?
H. F.: Notre taux de réussite, qui se mesure aux stagiaires faisant une formation complémentaire, varie entre 50% et 80%. Ça dépend surtout des connaissances linguistiques. G. C.: Nous avons aussi eu des échecs et avons dû dire à certains que ça n’allait pas. Nos places sont trop précieuses pour les confier à des jeunes qui ne manifestent aucun intérêt.
Quelle est la plus belle victoire pour lebensträume@work et schlipf@work?
G. C.: Que les jeunes se libèrent des dépendances qui les menacent. Et le fait qu’ils se disent: je peux prendre ma vie en main, je ne dépends pas des institutions ou des personnes qui me donnent de l’argent, je peux me débrouiller seul.
Existe-t-il d’autres établissements similaires?
G. C.: ll y a Jobfactory ou Parterre à Bâle, mais ils sont nettement plus grands. Nous voulons rester petits parce que nous tenons énormément à l’aspect familial, qui fait souvent défaut à nos jeunes. Nous le vivons, nous allons en cuisine et discutons avec eux, même le comité participe. C’est ce qui nous distingue des autres établissements et ce que tout le monde apprécie.
lebensträume@work
L’association de soutien existe depuis 2006 et depuis douze ans dans sa forme actuelle. Elle gère le restaurant schlipf@work à Riehen (BS) en tant qu’organisation à but non lucratif. L’offre de midi sert 4500 repas par semaine aux écoles de Riehen et de Bettingen. Un service de traiteur est également proposé. Chaque année scolaire, le stage permet à six jeunes d’obtenir un certificat de travail qui leur ouvre ensuite la porte d’un apprentissage. Par ailleurs, une collaboration est en place avec le canton et la commune sur la base de conventions de prestations, tandis que des fondations et des donateurs et donatrices soutiennent des acquisitions plus importantes.
Texte: Petra Mürschel-Evans
Photo: Christoph Kaminski